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Extraits Tome 2

Tikrit

... Donc ce sont toujours des bizuths, pas pour très longtemps certes, mais ce n’est pas avec quarante heures de vol au compteur qu’ils vont pouvoir rouler les mécaniques. Alors, la discipline ils connaissent ! ça marche au pas. Enfin presque… Depuis ce matin, toute la promotion 29 a la boule à zéro. D’ailleurs le lieutenant, en entrant dans la salle de cours, a fait un pas en arrière, il a cru qu’il s’était trompé de porte : cinquante-six skinheads au garde à vous… ça décoiffe ! Il ne leur manque plus que le Levy Strauss Modèle 501 et la paire de Doc Martens ! En fait, ces abrutis de la 27 leur ont infligé une punition collective, pour un motif aussi futile que, par exemple, rouler en sens interdit, sans permis de conduire, dans les rues de Tikrit.

Une fois ses esprits retrouvés, le lieutenant s’adresse aux skinheads de la mécanique du vol :

 - Les quatorze personnes dont les noms suivent doivent se rendre, ce soir à 20 heures, dans le bureau du colonel Abdel Harman.

 

Silence de mort. On entend les mouches voler. Le moment que chacun attendait depuis son arrivée au collège. Tout le monde sait très bien de quoi il retourne. Le colonel Abdel Harman ne les a pas convoqués, ni pour prendre le thé, ni pour animer un atelier de broderie. Non, il va leur annoncer qu’ils vont quitter le collège...

 

Cazaux

Au menu ce matin, combat air-air, avec Jolly, le Tanguy du Mystère IV, un instructeur apprécié par tous, aussi bien pour sa gentillesse que pour son expérience. Joad attend avec impatience son tour, car il n’a pas fait de très bons résultats lors des sorties précédentes. Sa moyenne dépasse à peine le 10/20, mais il compte bien se rattraper aujourd’hui. Alors, pour mettre tous les atouts de son côté, il s’arrange pour passer derrière Hussain, aussi à l’aise en combat que Joop Zoetemelk au dernier tour de France. Il compte bien lui demander quelques conseils précieux au retour de vol, pas à Zoetemelk, à Hussain. Jolly déclenche les hostilités, avec sa bonne humeur habituelle :

- On y va Hussain ? N’oublie pas ton chargeur de caméra. Mais bon, sans vouloir te vexer, je crois que tu n’en auras pas besoin ! Ah ah ah !

- Je te filmerai au roulage !

- Ca ne compte pas !

Au top départ, l’instructeur breake comme un paludéen, sous 7 g dans le même plan. Mais vouloir se positionner derrière Jolly en virant aussi fort que lui relève de l’exploit. Alors Hussain se dit qu’il est temps de mettre en application ce que Lechantre lui avait montré un jour, à Tours, pour illustrer l’un des principes de base du combat air-air : la gestion de l’énergie. Hussain se met à tirer brusquement sur le manche pour attaquer une superbe chandelle...

 

Piège à Matou !

... Le leader repense à l’officier supérieur qui somnolait l’autre jour à l’état-major : « mission calculée » ! Il aurait dû dire « bien calculée » ! Réponse dans quelques secondes. Le secteur informe les deux MiG qu’ils ne sont plus qu’à 50 kilomètres du F-14 :

- P3 !

Les deux MiG-23 plongent vers le sol pour rejoindre le sommet des palmiers dattiers et faire demi-tour. Pas question pour eux de rester exposés plus longtemps.

Les deux pilotes de F1 éjectent leurs réservoirs pendulaires, poussent la manette des gaz pour accélérer à 900 km/h, mettent leur radar en émission, légère élévation de l’antenne et échelle sur 40 kilomètres. C’est parti ! Ils amorcent un virage serré à gauche tout en tirant sur le manche. Cap à l’ouest. Ils ont tellement rejoué la scène la semaine dernière, à l’ouest de l’Iraq dans le désert de Syrie, qu’ils pourraient dérouler la procédure en lisant le journal. Lorsque la patrouille dépasse les 600 mètres de hauteur, le contrôleur du secteur 3 aperçoit les deux échos sur son écran. Pile derrière le Tomcat. Il en a la chair de poule Mister Logarithme.

Sur l’écran radar de chacun des F1, très rapidement la cible...  

Le ballet des traînées blanches

... Dès le décollage, le contrôleur au sol transmet le vecteur d’interception. Le temps est compté car il faut rejoindre l’objectif avant qu’il n’atteigne le front et largue leurs bombes et autres gadgets du même style. La patrouille commence à grimper pour atteindre les 9000 mètres. Monsieur météo annonce ce matin un temps splendide et une visibilité excellente. D’ailleurs, lorsque la patrouille de F1 arrive sur zone, les deux pilotes aperçoivent au loin les traînées de condensation de leurs collègues iraniens.

Malheureusement, ces derniers ne veulent pas jouer ce matin, et dès le premier accrochage radar d’Abdul Karim, la formation iranienne entame un break et fait demi-tour, tout en descendant.

Les deux pilotes iraquiens semblent émerveillés par le spectacle qu’ils observent au loin. 12 traînées de condensation qui négocient un large virage en descente pour faire demi-tour. Une vague de 4 patrouilles de 3 avions chacune. 36 tonnes de bombes ! Mais le radar du leader semble, lui aussi, subjugué car il reste accroché sur l’ancienne position, celle où les F-4 arrivaient de face. Abdul Karim décroche et raccroche dans la foulée pour venir se fixer sur l’un des fuyards. Que nenni ! Le Cyrano IV en a décidé autrement : il se raccroche sur « quelque chose » situé dans la même zone que tout à l’heure. Dans l’axe et un peu... 

Mission Super Etendard. Du brut et des bulles... 

A quelques kilomètres de la « frontière » maritime, juste avant de prendre un peu de hauteur pour faire une première recherche radar, la trajectoire de la patrouille coupe le joli sillage d’un navire qui forme un interminable ruban clair, parfaitement rectiligne. Les pilotes aperçoivent la traînée sur leur gauche, au nord, mais un peu de face. Elle disparait à l’horizon, là-bas, à 25 km. L’autre extrémité est derrière eux, ils ne verront donc pas si le plaisancier se dirige vers Kharg ou s’il en revient. Pas grave, on va lui laisser notre carte de visite. Presqu’en même temps, Ommar et Abdulah appuient sur le poussoir « mark » du poste de commande de navigation. Les coordonnées ainsi mémorisées pourront servir de waypoint de navigation au retour, si la pêche n’a rien donné, là où les traîneurs de sabre de l’état-major leur ont demandé d’aller. La trace claire dans le sillage du bateau persiste plusieurs heures par temps calme, et peut mesurer plus de 50 km. La couleur claire provient des microbulles d’air saturé en humidité qui vont rester très longtemps en sustentation avant d’atteindre la surface de l’eau.

C’est la rotation des hélices et le déplacement de la coque qui génèrent ces bulles ; si les plus grosses disparaîtront très vite, les milliards de microbulles formeront ce long ruban clair.

La pêche ne donne rien, pas l’ombre d’un tanker dans la zone largement couverte par les deux radars de la patrouille. ça ne mord pas, on plie les gaules. Par contre...